Juin 2023 Par Jérôme Lamy
Très proche de ses électeurs et de leurs préoccupations quotidiennes, Amelia Lakrafi a gagné la confiance des Français résidant aux Emirats arabes unis et du Président de la république Emmanuel Macron. La députée de la 10e circonscription des Français de l’étranger portera à nouveau les couleurs de la Majorité Présidentielle lors des prochaines élections législatives (5 et 19 juin) pour briguer un second mandat.
A la vie, comme à l’Assemblée Nationale, Amelia Lakrafi n’a pas changé une méthode qui gagne. Brillante dirigeante d’une société de sécurité informatique, Amelia Lakrafi appartient aux club des députés issus de la société civile qui ont profité de la victoire surprise d’Emmanuel Macron en 2017 pour siéger à l’Assemblée nationale. Elle appartient surtout au cercle, plus restreint faut-il en convenir, des nouveaux députés qui ont réussi leur mandat.
Présente en circonscription plus que sur la scène médiatique, Amelia Lakrafi a gagné la confiance des Français résidant aux Emirats arabes unis, des autorités émiriennes et du Président de la République dont elle a l’oreille. Présidente du Groupe d’amitié parlementaire France – Emirats arabes unis, elle a été très présente aux côtés des Français pour affronter la crise sanitaire. Cette ancienne chef d’entreprise a également aidé les entrepreneurs à développer leur réseau, notamment avec les entreprises locales.
Mais l’élément majeur et fondateur de sa première expérience parlementaire – il serait étonnant que les Français ne lui renouvellent pas leur soutien pour un second mandat – c’est la création de la Fédération Internationale des Bienfaisances et Entraides des Français résidant à l’étranger (FIBRE). « Tous les Français de l’étranger ne sont pas de richissimes expatriés » dit celle qui réconcilie les Français avec la politique. Noble et pure. Comme l’engagement d’Amelia Lakrafi.
Pouvez-vous dresser un bilan de votre action aux Émirats Arabes Unis depuis votre élection comme députée de la 10e circonscription des Français de l’étranger, en juin 2017 ?
J’ai tout de suite considéré les Emirats arabes unis comme l’un des pays les plus importants de ma circonscription. On y comptait alors la seconde communauté française après le Liban, ce qui s’est désormais inversé et avant Madagascar. Il s’agit d’un partenaire important de la France avec une base navale, des relations économiques importantes. L’un des premiers déplacements qu’il m’a été donné de faire dans ma circonscription était aux Emirats à l’occasion du déplacement du Président de la République en novembre 2017 pour l’inauguration du Louvre Abou Dabi justement. J’ai immédiatement voulu devenir présidente du groupe d’amitié parlementaire avec ce pays. A chaque déplacement je rencontre, en plus de la communauté française, des officiels, députés ou ministres émiratis. Et je me permets de pousser quelques sujets qui en ont besoin.
De plus en plus de Français ont fait le choix de s’expatrier à Dubaï pour entreprendre. Comment expliquez-vous cet engouement?
Oui, c’est vrai qu’en plus d’une population plus traditionnelle d’expatriés employés par des entreprises ou des grands groupes présents aux Emirats arabes unis, on observe que beaucoup de jeunes Français s’expatrient à Dubaï ou Abu Dhabi car ils y trouvent un environnement professionnel plus dynamique et parfois plus accessible pour eux. Mais c’est surtout le goût de l’aventure dans un univers culturel et économique très stimulant qui pousse de nombreux jeunes gens à s’y expatrier. Par ailleurs, de nombreux Français du Liban sont aussi partis y travailler dernièrement du fait de la crise sans précédent que connaît le Liban. La communauté française des Emirats est ainsi devenue la première de ma circonscription.
Comment accompagnez-vous ces entrepreneurs ?
J’essaie d’aider la communauté française en travaillant à accroître encore davantage les courants d’affaires entre nos deux pays mais aussi en encourageant le développement de notre réseau d’établissements scolaires dans le pays car il doit être capable de pouvoir accueillir les enfants de tous ces nouveaux expatriés! Je déplore que la Sorbonne Abu Dhabi ne soit pas assez valorisée. Je remonte les remarques au plus haut niveau de l’Etat quand cela me semble pertinent.
On l’oublie souvent mais l’assistance sociale aux Français résidant hors de la métropole est aussi un des grands défis de votre mandat…
Effectivement, tous les Français de l’étranger ne sont pas de richissimes expatriés comme on le croit souvent. Dans ma circonscription, où résident par ailleurs de nombreux bi-nationaux, il y a des situations sociales très diverses et de très nombreux Français dans le besoin. Je pousse pour que les aides sociales soient augmentées, je suis heureuse que la majorité présidentielle ait multipliée par trois la subvention aux OLES (association d’entraide pour les français en difficulté à l’étranger) et qu’il y ait aussi plus de transparence dans leur attribution. Enfin, j’encourage les OLES à soutenir et à mieux accompagner les Français les plus fragilisés au moyen notamment de la FIBRE (fédération internationale des bienfaisances et entraides), l’association dont je suis la Présidente d’honneur.
Vous avez lancé, en juillet 2020, la Fédération Internationale des Bienfaisances et Entraides des Français résidant à l’étranger (FIBRE) ? Forcément, c’est un acte majeur dans votre combat pour plus de solidarité...
C’est effectivement une initiative qui vient de l’idée que les OLES du monde entier fonctionnent indépendamment les unes des autres. Et c’est normal car elles ont été créées le plus souvent par des Français installés dans ces pays de longue date et ce sont donc des initiatives totalement locales. Pourtant à plusieurs, on est plus fort, et je suis convaincue qu’un réseau d’associations agissant en synergie a plus de poids pour obtenir des financements ou pour agir. J’ai été immédiatement séduite par toutes ces Françaises et tous ces Français qui se mobilisent pour aider les autres. Les Français de l’étranger ont souvent une réelle fibre sociale et un grand cœur.
Vous êtes présidente du Groupe parlementaire d’amitié France – Emirats arabes unis. Pouvez-vous nous expliquer son rôle?
Je suis effectivement très honorée de présider ce groupe d’amitié. Le but d’un tel groupe d’amitié parlementaire est de contribuer à développer les relations d’amitié, la coopération avec un autre pays dans les domaines culturel, économique, politique entre autres. De développer aussi les relations entre parlementaires des deux pays. Nous avons beaucoup travaillé avec l’ambassade des EAU à Paris pour cela ainsi qu’avec notre ambassade à Abou Dabi. L’exposition universelle à Dubaï a donné une opportunité aux Français de découvrir ce pays. J’ai d’ailleurs organisé l’automne dernier une réunion du groupe d’amitié autour du commissaire du Pavillon France et de nombreux députés ont déjà pu se rendre à Dubaï pour visiter notre Pavillon!
Vous accomplissez votre premier mandat de député. Comment s’est déroulé votre apprentissage?
Comme tous les députés nouvellement élus à l’assemblée en 2017, je venais de la société civile et ne m’imaginais pas un jour représenter mes compatriotes au parlement. C’était évidemment un grand honneur mais aussi beaucoup de responsabilités. J’ai voulu être dans mon mandat comme dans ma vie, proche des gens, à l’écoute et toujours travailler en équipe, avec et pour mes compatriotes, j’ai mis en place rapidement plusieurs outils et ai été à l’origine de plusieurs associations pour pallier à certaines difficultés du quotidien, comme avoir une adresse postale en France avec la création du service Maison des Français de l’Etranger (mfe@mfe.paris). J’ai créé un site internet, (co-ci.fr pour comité citoyen) un outil dédié que je mets à disposition pour des suggestions, des témoignages. J’ai aussi régulièrement proposé des sondages et questionnaires sur des sujets très ciblés comme la santé ou la simplification administrative.
Le Président de la République Emmanuel Macron a réalisé un score de 45,18% des suffrages au premier de l’élection présidentielle dans votre circonscription avant d’être plébiscité au second tour. Comment expliquez-vous un tel succès ?
Les Français expatriés sont bien conscients – peut-être plus qu’en France – de l’esprit de réforme qui anime le Président et sont le plus souvent en phase avec cette volonté de moderniser notre pays. Je pense qu’ils sont fiers aussi de son action à l’international et de sa manière d’incarner la France, de son courage et abnégation. Depuis la crise sanitaire, les Français expatriés ont connu de nombreuses difficultés: ils savent cependant qu’ils ont l’écoute du Président. Compte tenu des conditions exceptionnelles qui ont marqué son mandat avec en particulier la crise des gilets jaunes, les retraites, la pandémie de la covid-19 et pour finir la guerre en Ukraine, notre Président a démontré qu’il était un Chef d’Etat hors du commun qui a su prendre des décisions difficiles. Ce quinquennat a par ailleurs été marqué par de nombreuses réformes structurelles dans les domaines économiques, sociétaux ou environnementaux, ainsi que par un réel retour de la France sur la scène internationale.
Vous-même, serez-vous candidate à votre succession, lors des prochaines échéances législatives?
C’est un honneur de représenter les français à l’Assemblée nationale. Il y a encore tant à faire! Je me suis fortement attachée à tous ces Français de ma circonscription que j’ai essayé d’aider au mieux depuis le début de la crise sanitaire qui a provoqué de très nombreuses difficultés pour eux. Et il y a de nombreux dossiers de fonds sur lesquels je souhaite continuer de travailler telles les violences faites aux femmes, l’entrepreneuriat féminin, le droit au compte bancaire ou encore la santé des Français de l’étranger.
Pouvez-vous nous parler de l’offre scolaire et culturelle à destination des Français résidant aux Émirats Arabes Unis?
L’Institut français et les alliances françaises présentes aux Emirats sont extrêmement dynamiques et jouent un rôle de premier plan au niveau culturel pour la communauté française. J’ai eu l’honneur en novembre 2020 d’assister à l’inauguration de la librairie française à l’Alliance française d’Abou Dabi, qui est la seule librairie française du Golfe. L’offre scolaire semble a priori foisonnante puisqu’on ne dénombre pas moins de 7 établissements d’enseignement français. Toutefois, la population française des Emirats étant en pleine expansion et étant plutôt jeune, il faut s’assurer que ce réseau se développe afin de répondre de manière adaptée à cette demande croissante. Je suis très attentive à tout ce qui peut favoriser l’émergence ou le développement d’acteurs privés dans ce domaine car c’est le seul moyen de permettre à notre réseau d’établissements scolaires de croître.
La French Tech, mouvement français des startups, est une vraie signature de la France à l’étranger. Cet écosystème existe-t-il aux Émirats Arabes Unis?
Oui, il y a une French Tech à Dubaï qui fédère les entrepreneurs français de l’économie numérique. Elle a d’ailleurs récemment été rebaptisée “French Tech Emirats arabes Unis”. Je me réjouis, en tant qu’ancienne dirigeante d’une société de cybersécurité, qu’Elodie Robin-Guillerm, une femme compétente et dynamique, ait été nommée présidente. Je milite activement pour la présence des femmes dans l’économie numérique et la tech.
La fiscalité est un vrai enjeu pour les Français résidant à l’étranger…
La fiscalité est un enjeu pour tous les Français en général. Je souhaite notamment que l’on cesse de considérer qu’un appartement conservé en France soit considéré comme une résidence secondaire en faisant émerger la notion de “résidence de repli”. Certains Français peuvent devoir quitter leur pays de résidence à l’étranger du jour au lendemain quand se termine leur contrat de travail, c’est notamment le cas dans les pays du Golfe. Pour ceux qui en ont les moyens, conserver un appartement en France, c’est une sécurité.