×

Le premier magazine international entre les Emirats arabes unis et la France, notamment entre Abu Dhabi, Dubaï et Paris.

Suivez-nous

Standing International Magazine - Accueil > Hakimi, bébé Larguet

Hakimi, bébé Larguet

Hakimi, bébé Larguet -- Standing International Magazine

Novembre 2024 Par Jérôme Lamy, à La Roche sur Yon

Nasser Larguet avait convaincu Achraf Hakimi de porter le maillot des Lions de l’Atlas alors que l’Espagne lorgnait sur le prodige. Gros plan sur la bi-nationalité, un débat essentiel dans le football international.

Brahim Diaz, Eliesse Ben Seghir, Lamine Yamal… autant de joueurs de talent qui ont monopolisé le débat et les passions autour du thème des bi-nationaux. Si les deux premiers ont choisi de porter les couleurs du Maroc au détriment de l’Espagne et de la France, le troisième a opté pour l’Espagne. « Je suis fier qu’un joueur de très haut nivea comme Brahim Diaz choisisse de porter les couleurs des Lions de l’Atlas non par défaut mais par envie » précise Nasser Larguet. « Néanmoins, j’ai toujours respecté les joueurs qui ne font pas ce choix-là. Leur décision doit être motivée par deux niveaux de réflexion le cœur et la raison. Le cœur, c’est bien sûr les origines, les liens familiaux. La raison, c’est le choix sportif, l’ambition de carrière. Pour qu’un choix soit le meilleur possible, il faut les deux aspects: le cœur et la raison. Naturellement, depuis le Mondial au Qatar, la sélection donne envie. Et le choix de la raison est au moins aussi fort que celui du cœur. »

 

L’équation des bi-nationaux, Nasser Larguet cherche à la résoudre depuis qu’il a pris la direction de l’Académie Mohammed VI en 2008. On peut même dire qu’il a joué un rôle décisif dans le choix de carrière d’Achraf Hakimi. Sans Nasser Larguet, l’arrière droit du PSG n’aurait peut-être jamais porté le maillot des Lions de l’Atlas. Le Directeur technique national a usé de son intelligence et de son humanisme pour emporter l’adhésion des parents et du jeune joueur alors que l’Espagne lorgnait sur le prodige. Il convient de préciser que Larguet possède une véritable expérience dans le dossier des bi-nationaux: il a également convaincu Sofyan Amrabat, Mazraoui, Boufal et Harit de défendre les couleurs du Maroc. « On a seulement perdu Ismaël Bennacer » dit Nasser Larguet. « Je l’avais invité avec ses parents, à l’Amphitrite Palace, à Skhirat. Il a choisi l’Algérie. C’est une déception. Il aurait pu disputer deux Coupes du Monde avec le Maroc… »

 

Le dossier des joueurs bi-nationaux a toujours été essentiel pour Larguet. Il possède le mode d’emploi et un pouvoir de séduction. « Ma première mission de DTN a été la détection de 24 joueurs âgés de 17 ans formés au Maroc et 14 autres joueurs binationaux » explique-t-il. « Nous avons alors organisé un stage à Ploufragan en Bretagne et un tournoi avec les équipes de Caen, Rennes, Lorient et le Gabon. Nous avons gagné tous nos matches, avec nos deux équipes. Et le meilleur joueur marocain du tournoi était bi-national. Il avait été repéré par Rabie Takassa, un de nos recruteurs en Europe. Il se nommait Achraf Hakimi. »

 

Né à Madrid de parents d’origine marocaine, Achraf Hakimi avait le choix entre les sélections marocaines et espagnoles. « Ma première action a été une visite au club d’Achraf, en l’occurrence le Real de Madrid » précise Nasser. « C’est essentiel d’entretenir des relations saines avec les clubs. Il est important de les rassurer au sujet du calendrier des rencontres internationales et leur assurer que, dans l’hypothèse d’un match capital au niveau du club, ils ne seraient pas obligés de libérer le joueur. Il faut impérativement éviter les conflits avec les clubs. Les bi-nationaux respirent Europe. I mangent Europe. Ils réfléchissent Europe. Ils sont entraînés par des Européens. Ils son payés par les Européens. Il faut respecter les clubs. Car le joueur est d’abord un sportif employé par un club. L’ambition, c’est que le joueur soit le plus serein possible. »

 

C’est dans ce climat apaisé que l’aventure d’Hachraf Hakimi avec la Fédération Royale Marocaine a débuté. N’empêche, l’histoire aurait pu se terminer brutalement. « Pendant plus d’un mois, je n’ai eu aucun contact téléphonique avec le papa d’Achraf alors que nous étions en contact permanent» se souvient Nasser. « J’étais d’autant plus inquiet que j’ai appris que le nom d’Hakimi avait été coché sur une liste espagnole. J’ai finalemen réussi à parler au joueur. Il était très perturbé. Je lui ai conseillé d’aller au rassemblement espagnol et de comparer. Et je lui ai promis de venir le voir après son stage. »

 

Ainsi, sur la route de Lyon pour un rendez-vous majeur avec Hervé Renard, priorité absolue dans la succession de Badou Zaki, Nasser Larguet a fait un crochet par Madrid. Dans la capitale espagnole, il est attendu par le joueur, son papa et deux agents espagnols. L’heure est grave. « Je sentais que cet entretien serait décisif » confie Nasser « Achraf m'a tout de suite exprimé ses craintes. S’il choisissait le Maroc, il avait peur que son contrat avec le Real ne soit pas renouvelé et par la même occasion de perdre le partenariat avec Adidas promis à chaque joueur. Je l’ai questionné sur ses ambitions. Je l’ai alerté sur la forte concurrence en Espagne à son poste avec la présence de Carvajal, Alba, Llorente, Reguilon, Wass, Roberto et bien d’autres. A l’inverse, je l’ai sensibilisé sur la faiblesse du réservoir marocain. Derrière Nabil Dirar, qui était trentenaire, il y avait des places à prendre. Je ne pouvais pas prédire l’avenir mais je l’ai convaincu qu’il jouerait peut-être une Coupe d’Afrique des Nations et une Coupe du Monde avec le Maroc avant que des places se libèrent en Espagne. »

 

Nasser Larguet laisse le temps de la réflexion à la famille Hakimi et à leurs agents. I sollicite seulement une réponse avant son départ pour Lyon. Elle est favorable. Le jeune Achraf promet à Nasser Larguet d’attendre sa première convocation avec les Lions de l’Atlas pour choisir définitivement le Maroc… « Quel soulagement ! » confie Nasser. « savais que c’était une pépite. Je lui ai tendu la main au moment de nous séparer. Je lui ai dit : ‘Achraf, une poignée de mains, c’est plus important qu’un contrat. Alors prends-moi la main’… »

 

Hervé Renard tendra aussi la main à Nasser Larguet sur le dossier Hakimi. Lors de leur rencontre à Lyon, Nasser sollicite l’aide du futur sélectionneur national. « Je ne te demanderai plus jamais rien de ma vie mais je vais te solliciter pour une seule chose » lance Larguet à Renard. « Lors de ton premier rassemblement, je te prie de sélectionner un gamin qui s’appelle Achraf Hakimi. Hervé Renard m’a écouté. Achraf a été timide lors du premier stage et brillant lors du second ! »

On connaît la suite..