Juin 2023 Par Jérôme Lamy, à Paris
Incontournable dans le développement du tourisme mondial, depuis 50 ans, Jean-Robert Reznik est un personnage exceptionnel et intemporel qui a marqué l’histoire du Club Méditerranée, de la Compagnie Air France et du Groupe Accor. Il se souvient de sa rencontre avec le fondateur des Emirats arabes unis, Sheikh Zayed…
Il aurait voulu être un artiste. Il aura été un acteur du tourisme mondial. Attention, pas un second rôle. Encore moins un figurant. Jean-Robert Reznik a été un personnage principal d’une industrie qui représente aujourd’hui plus de 10% de l’économie planétaire. Héros du développement touristique international, il a marqué l’histoire du Club Méditerranée, du Groupe Accor et de la Compagnie Air France. Et offert du travail à des milliers de personnes à travers le monde. En modifiant le destin de nombreux pays, Jean-Robert a aussi changé le sien dans des proportions qui confirment qu’il faut parfois dissocier la règle de l’exception.
Chez Jean-Robert Reznik, le rêve a dépassé la réalité. Des plages de Mostaganem en Algérie où il est né au firmament de la reconnaissance internationale entre le Maroc, les Emirats arabes unis, la Thaïlande, l’Egypte, l’Ile Maurice, le Mexique, l’Indonésie, Haïti, la Jordanie, Israël, la République Dominicaine ou la Tunisie, sa vie est une légende qui inspire.
Le tourisme sans culture est un monde sans moral. «Le tourisme n’a de réalité que s’il autorise le développement culturel » confirme cet humaniste qui a rapproché les hommes, gommé les frontières physiques et mélangé les cultures. Il a compris avant les autres que le tourisme et la culture étaient intimement liés. Et que l’art était un bien commun où les différences étaient une chance dans le grand combat des humanistes contre la défiance, la peur de l’inconnue et le repli communautaire. Ces idées ont changé le destin des entreprises où il a exercé son incontestable talent et la vie de ses collaborateurs.
Il est allé où personne n’était allé. Il a cru à des pays où personne n’aurait misé le moindre kopeck. On doit lui créditer la découverte de destinations mythiques comme Cancun, spot festif au Mexique bordé par la mer des Caraïbes ou Punta Cana, oasis de rêve en République Dominicaine avec ses eaux transparentes. J2R masque derrière une excentricité assumée une exigence professionnelle incomparable et une ambition inaltérable.
A bien regarder son carnet d’adresses, on arrive à se demander si Jean-Robert Reznik est une référence du développement touristique mondial ou un diplomate envié pour son entregent. On en déduira que le tourisme est une forme de diplomatie parallèle où J2R a excellé. « J’ai eu la chance de créer des liens avec certains des hommes qui ont le plus pesé sur la vie des pays arabes » confirme-t-il avec une émotion non feinte.
Il mentionne le Sheikh Zayed, fondateur des Emirats arabes unis. « C’est assurément une des rencontres les plus marquantes de mon existence » confie Jean-Robert Reznik. « Je l’ai rencontré, à Hong Kong, lors de l’inauguration des bureaux du Club Méditerranée dont les Emirats arabes unis étaient propriétaires. A la suite de cette rencontre, je l’ai accompagné en Egypte. Le Président Hosni Moubarak voulait qu’il investisse loin de la station balnéaire de Sharm El Sheikh et de la baie naturelle de Naama Bay. Je lui ai conseillé de se rapprocher de Naama Bay où il a construit une maison. Il m’a remercié pour ce conseil. Ensemble, nous avons développé trois hôtels Palmariva au Maroc et cinq en Egypte. Le Sheikh Zayed était précurseur. Il possédait une vison moderniste au moment de l’émergence du pétrole aux Emirats arabes unis. Il a maitrisé le développement de son pays avec une ambition d’ouverture d’esprit sur le monde et la culture. »
Il cite le Roi du Maroc Sa Majesté le Roi Hassan II. « Il était non seulement conscient que son pays devait être un grand pays industriel, technologique, agricole mais aussi un pays tourné vers le tourisme » dit J2R. Il évoque président égyptien Anouar el-Sadate. « Je l’ai rencontré avant son discours historique devant la Knesset, le parlement israëlien, en novembre 1977» précise-t-il. Il nomme aussi le président tunisien Habib Bourguiba. « Je suis fier d’avoir partagé avec lui ses espérances sur le développement de la Tunisie et son combat pour l’émancipation des femmes africaines» dit-il.
Durant son immense carrière, Reznik déniche des grands talents. Promeut des jeunes. « La plus grande fierté de ma carrière » dit-il. Impossible de les citer tous tant la liste est longue. S’il ne devait en relever qu’un, ce serait Khalid Anib. Il s’impose comme une évidence. « Quand j’ai rencontré Khalid, il travaillait à l’animation du Palais des Congrès à Marrakech » précise Jean-Robert. « Il avait des qualités hors normes. Il comprenait vite. En fait, il devançait mes attentes. Et il avait une relation humaine très forte avec les clients. C’était peut-être le meilleur… » Après une carrière remarquable au sein du Groupe Accor, il est aujourd’hui président de Abu Dhabi National Hôtels.
Khalid Anib ne tarit également pas d’éloges sur son mentor. « C’est un leader inspirant » dit-il. « Ses mots clefs sont innover et persévérer. C’est une extraordinaire boîte à idées. Il a aussi un nez incroyable. C’est un défricheur de destinations. Il sent le tourisme, les tendances et les futures habitudes des voyageurs. Il ne se trompe pas beaucoup. » Et cela se vérifie autant dans ses politiques de développement touristique que dans le choix de ses collaborateurs. Reznik a une seule frontière : le mur des tristes et des atrophiés de la générosité. «Il personnifie la droiture, la fidélité et l’altruisme » avoue Khalid Annib. « Dès que j’en ai l’occasion, j’essaye de passer du temps avec Jean- Robert. Il a deux passions : le tourisme et les hommes. On apprend toujours à son contact dans la joie, la bonne humeur et l’humour. »
Jean-Robert Reznik a la recette du bonheur. « Dans la vie, il faut un tiers de rêve, un tiers de matérialisme et un tiers d’humour pour ne surtout pas prendre trop au sérieux les deux premiers tiers… »